Veilles

VEILLE JURIDIQUE OPERATIONS IMMOBILIERES – FEVRIER 2023

FISCALITE


Evaluation du prix de vente d’un château pour le calcul de l’ISF

Dans un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 5 décembre 2022, il a été jugé que l’administration fiscale peut évaluer à son prix de vente la valeur vénale d’un bien exceptionnel, tel qu’un château du XXème siècle classé monument historique, pour le calcul de l’ISF.

En l’absence de méthode imposée par la loi, cette méthode d’évaluation a été admise dès lors que la méthode habituelle par comparaison avec des cessions de biens intrinsèquement similaires n’était pas possible eu égard à la nature singulière du château.

Les seuls éléments à la portée de l’administration, soit le mandat de vente et la vente, étaient contemporains du fait générateur de l’impôt et reflétaient donc bien la réalité du marché à cet instant.


Modification du champ d’application de la TVA à 5,5 % en matière de travaux énergétiques

La loi de finances pour 2023, publiée le 31 décembre 2022, a apporté des modifications concernant le champ d’application du taux réduit de TVA à 5,5 %.

L’article 65, I – C de la loi susvisée réécrit l’article 278-0 bis A du CGI, et modifie les conditions d’application du taux réduit de TVA sur les prestations de rénovation énergétique.

L’apport principal de cette modification concerne les locaux « destinés à être affectés, à l’issue des travaux, à un usage d’habitation » puisque, dans sa version précédente, l’article 278-0 bis A du CGI ne visait que les locaux à usage d’habitation. Cet ajout vient donc élargir le champ d’application de la TVA à 5,5 %.

Autre modification majeure, cette nouvelle rédaction ne vise plus expressément les travaux induits qui sont indissociablement liés aux prestations de rénovation énergétique, qui pouvaient également bénéficier du taux réduit. 

Il conviendra d’être vigilant sur ce point dans l’attente de la parution des décrets d’application (au plus tard au 1er janvier 2024).


Taxe d’habitation : la majoration pour les résidences secondaires reportée à 2024

Depuis 2014, les communes de plus de 50 000 habitants concernées par un « déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements » peuvent appliquer une majoration de la taxe d’habitation sur les maisons secondaires.

La tension sur le logement ne faiblissant pas, la loi de finances pour 2023 a confirmé que de nouvelles communes seraient éligibles, dès 2023, à la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires en supprimant le critère des 50 000 habitants.

Le décret d’application devrait finalement intervenir au second semestre 2023 retardant l’entrée en vigueur de cette mesure à 2024.

Dès sa publication, près de 5 000 communes subissant une forte pression immobilière pourront bénéficier de la même mesure.


Propriétaire d’un bien immobilier : nouvelle obligation déclarative à partir de 2023

Depuis le 1er janvier 2023, les contribuables ne sont plus assujettis à la taxe d’habitation sur leur résidence principale, mais le restent pour leur résidence secondaire et les logements vacants.

Afin d’identifier les biens restants soumis à la taxe d’habitation, tous les propriétaires devront désormais déposer une déclaration avant le 1er juillet de chaque année, en renseignant la nature de l’occupation des locaux au 1er janvier, ainsi que l’identité de l’occupant s’il s’agit d’un tiers (article 1418 du CGI).

Cette nouvelle obligation déclarative incombe à tous les propriétaires pour l’année 2023, et ne devra être renouvelée pour les années postérieures qu’en cas de changement de situation.

Le défaut de déclaration, ainsi que l’omission ou l’inexactitude des renseignements fournis, sont passibles d’une amende fiscale de 150 € par bien immobilier.


Auto liquidation de la TVA en l’absence de contrat de sous-traitance

Dans un arrêt du 5 janvier 2023, la Cour administrative d’appel de Lyon a apporté des précisions concernant l’application du régime d’autoliquidation de la TVA dans le secteur du bâtiment en l’absence de contrat de sous-traitance.

Pour mémoire, depuis 2014, l’autoliquidation de la TVA est obligatoire dans le secteur des bâtiments et travaux publics. Ainsi, lorsque les travaux de construction sont réalisés par un sous-traitant pour le compte d’un donneur d’ordre assujetti à la TVA, le sous-traitant facture ses prestations hors taxes. C’est l’entreprise donneur d’ordre qui déclare et reverse la TVA à l’État.

Dans l’arrêt précité, une entreprise individuelle de prestations d’électricité générale, qui avait effectué des travaux en qualité de sous-traitant mais sans conclure formellement de contrat de sous-traitance, avait appliqué l’autoliquidation la TVA.

La Cour administrative d’appel de Lyon donne raison à l’Administration fiscale et estime qu’en l’absence de contrat de sous-traitance et de factures et devis détaillés, l’entreprise ayant réalisé les travaux, qui ne peut être considérée comme ayant la qualité de sous-traitant, ne pouvait appliquer le régime d’auto liquidation de la TVA.


IMMOBILIER


Résidences de services séniors : l’encadrement des loyers s’applique

Par une réponse ministérielle en date du 20 décembre 2022, il est rappelé que le champ d’application du dispositif d’encadrement des loyers (article 140 de la loi ELAN)  ne prévoit aucune dérogation concernant les locations nues des résidences de services pour séniors.

Par conséquent, les logements situés au sein de résidences de services pour seniors obéissent au corpus législatif et règlementaire relatif à l’encadrement des loyers.

L’application d’un complément de loyer pourra donc être justifiée par les caractéristiques de localisation ou de confort du logement, à condition que celles-ci remplissent les trois critères cumulatifs précisés par décret :

– Absence de prise en compte dans la détermination du loyer de référence ;

– Caractéristiques déterminantes pour la fixation du loyer (notamment par comparaison avec les logements de même catégorie et secteur géographique) ;

– Absence de récupération par le bailleur au titre des charges.


Pérennisation du dispositif MaPrimeRénov’

En vigueur depuis le 1er juillet 2021, l’éligibilité au dispositif MaPrimeRénov’ devait prendre fin le 31 décembre 2022 mais a finalement été pérennisée par un décret en date du 29 décembre 2022.

Pour mémoire, cette prime de transition énergétique permet aux personnes physiques propriétaires ou titulaires d’un droit réel immobilier conférant l’usage d’un logement de financer les dépenses en faveur de la rénovation énergétique des logements donnés à bail.


Aucune indemnité pour perte de revenus locatifs n’est due en cas d’expropriation d’un logement non-décent

En l’espèce, une SCI loue un lot de copropriété composé de 2 chambres d’une surface respective de 8, 60 m2 et 7, 50 m2. La Société de requalification des quartiers anciens, dont le rôle est de lutter contre les logements indignes dans les chambres de service parisiennes, procède à l’expropriation des preneurs. À la suite de cette expropriation, la SCI demande une indemnité pour perte de revenus locatifs.

Dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 11 janvier 2023 n°21-23.792, les juges cassent la décision rendue par les juges du fond qui avaient accordé l’indemnité à la SCI. Au visa de l’article 1719 du Code civil, les Haut magistrats considèrent que « lorsque l’expropriation porte sur une habitation principale ne répondant pas aux critères du logement décent que le bailleur est tenu de délivrer à son preneur, le propriétaire exproprié ne peut se prévaloir d’un droit juridiquement protégé à l’indemnisation de la perte de revenus locatifs ».


La mention d’un montant maximal de prêt dans une promesse de vente n’oblige pas l’acquéreur à accepter toute offre de prêt d’un montant inférieur

En l’espèce, une promesse de vente portant sur un immeuble prévoyait une condition suspensive d’obtention d’un prêt d’un montant de 414 000 € maximum, remboursable sur vingt-cinq ans au taux de 2%. L’acquéreur renonce finalement à acheter l’immeuble alors même qu’il a obtenu une offre de prêt d’un montant de 407 000 € qu’il a refusée faute de pouvoir effectuer l’apport personnel demandé.

Dans un arrêt en date du 14 décembre 2022 n°21-24.539, la Cour de cassation considère que la promesse de vente est caduque. Les juges relèvent en effet que l’acquéreur avait fait une demande de prêt conforme à ce qui était prévu dans la promesse de vente et que cette dernière avait été refusée. Par conséquent, le vendeur ne pouvait se prévaloir du fait que l’acquéreur ait refusé une offre de prêt à un montant inférieur. En ce sens, l’indication d’un montant maximal de prêt n’oblige pas l’acheteur à accepter toute offre d’un montant inférieur.


Garantie des vices cachés, défaut de conformité et manquement à l’obligation d’information : le non-cumul des actions 

Par un arrêt du 18 janvier 2023, la Cour de cassation rappelle l’exclusivité d’application de l’action en garantie des vices cachés face à d’autres fondements.

En l’espèce, une société a vendu à un couple un corps de bâtiments à réhabiliter en maison d’habitation. Après avoir constaté que la charpente était infestée de parasites, les acquéreurs assignent leur vendeur en indemnisation de leur préjudice sur le fondement de l’obligation de délivrance, ainsi que sur celui de l’obligation de conseil et d’information.

La Cour constate que l’infestation parasitaire, entrainant un risque d’effondrement, ne pouvait constituer qu’un vice caché de la chose vendue. La caractérisation du vice excluait l’existence des manquements contractuels allégués, les actions ne pouvaient se cumuler.

Il faut noter que les juges acceptent toutefois le cumul d’actions en cas de nullité pour dol.


Mise à jour des statuts et recevabilité de l’action des membres

L’arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 23 novembre 2022 évoque le droit d’agir des membres d’une ASL aux fins d’obtenir la mise à jour des statuts de celle-ci. Cette mise à jour étant indispensable à l’exercice des attributs de sa personnalité.

En l’espèce, une mise en conformité n’avait pas pu être opérée car il manquait la déclaration d’un des propriétaires, exigée par la préfecture. Toute action en justice pour obtenir judiciairement les éléments nécessaires à la mise en conformité était paralysée, l’association syndicale ayant perdu le droit d’agir en justice, tandis que les membres de cette même association syndicale n’avaient pas qualité pour agir.

En conséquence, La Cour reconnait aux membres un droit propre et personnel à agir afin d’obtenir la mise en conformité des statuts. Ils peuvent donc agir en défense de leur propre intérêt contre le membre défaillant.


URBANISME


L’absence d’intérêt à agir d’un propriétaire sans titre contre un permis de construire

Selon un arrêt du Conseil d’État en date du 25 janvier 2023, la personne qui conteste un permis de construire doit justifier de sa qualité à agir en produisant son titre de propriété.

Légalement, la contestation d’un permis de construire est ouverte aux personnes qui justifient de leur qualité d’occupant régulier ou de propriétaire du bien que le projet, visé par le permis, est susceptible d’affecter directement.

Dans cette affaire, le demandeur avait seulement produit une offre d’acquisition du terrain d’assiette du projet en cause suivie de l’engagement d’une action devant le juge civil. Or, ces éléments ont été jugés insuffisants pour une revendication sérieuse de propriété. En découle le défaut de qualité à agir en contestation du permis de construire. 


L’insuffisance de l’étude d’impact justifie la mise en œuvre d’une action en démolition

Le 11 janvier 2023, la Cour de cassation a rendu un arrêt relatif aux conditions de l’action en démolition.

En l’espèce, le permis de construire relatif à la création d’un parc éolien a été annulé au motif d’une insuffisance de l’étude d’impact.

La Cour de cassation a jugé que l’insuffisance de l’étude d’impact entre dans le domaine du dispositif de l’action en démolition dès lors que le demandeur de l’action démontre avoir subi un préjudice personnel en lien de causalité directe avec la violation. Ainsi, elle précise qu’il n’est pas nécessaire que la construction ait été édifiée en violation du régime de protection propre à la zone dans laquelle elle se situe.

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Veille juridique opérations immobilières – Février 2023

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