Servitude de passage : impossibilité pour le propriétaire du fonds servant, en quelque qualité que ce soit, de diminuer la servitude ou de la rendre plus incommode
Le propriétaire d’un fonds servant ne peut se prévaloir de l’extinction de la servitude, suite au déplacement du chemin sur lequel elle débouchait, dès lors qu’il est également propriétaire de la parcelle sur laquelle se trouve le chemin et qu’il est à l’origine du déplacement empêchant l’utilisation de la servitude.
En l’espèce, les propriétaires du fonds servant, également propriétaires du chemin sur lequel débouche la servitude, ont aménagé leur propriété et déplacé le chemin sur d’autres parcelles leur appartenant, rendant la servitude inutilisable. Les propriétaires du fond dominant les ont alors assignés afin de faire constater la servitude et d’obtenir la réalisation de travaux permettant d’en user.
La cour d’appel de Nîmes dans un arrêt du 25 octobre 2018 a rejeté leur demande au motif qu’il résulte de la modification de la configuration des lieux une impossibilité pour le fonds dominant d’user de la servitude. Or en application de l’article 703 du code civil : « Les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent en tel état qu’on ne peut plus en user. » Par ailleurs, elle ajoute que le changement de configuration des lieux « affecte non pas le fonds servant mais le chemin de desserte sur lequel débouchait la servitude », et que les propriétaires ont agi en leur qualité de propriétaire de la parcelle supportant le chemin, et non pas en qualité de propriétaire du fonds servant.
La troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 25 juin 2020 a censuré ce raisonnement. Elle indique que « le propriétaire d’un fonds servant ne peut, en quelque qualité que ce soit, rien faire qui tende à en diminuer l’usage ou à la rendre plus incommode ».
Ainsi, dès lors que le propriétaire du fonds servant est à l’origine de l’impossibilité d’user de la servitude, il ne peut se prévaloir de son extinction et ce même s’il a agi en qualité de propriétaire de la parcelle sur laquelle se trouve le chemin et non en qualité de propriétaire du fonds servant.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 25 juin 2020, n°19-10.057